|ZOOM SUR: LA STATUE DE LOUIS XIV|

Emblématique de notre ville et de la place Bellecour, la statue de Louis XIV a une histoire tourmentée. Zoom sur ce repère incontournable de Lyon!

Qui ne s’est jamais donné rendez-vous sous la queue du cheval de Louis XIV? Pour notre team building « Coeur de Presqu’île », Louis XIV est d’ailleurs notre repère! Œuvre majeure de notre patrimoine lyonnais, de nombreuses questions se posent pourtant: pourquoi Louis XIV à Lyon? Le sculpteur a-t-il vraiment fait une erreur? S’est-il vraiment suicidé de déshonneur? Louis XIV va-t-il quitté définitivement la place Bellecour?

On tente de vous répondre…

PETITE HISTOIRE MOUVEMENTEE D’UNE STATUE

En réalité ce n’est pas une, mais bien deux statues du souverain français qui ont orné la place Bellecour, enfin la place Louis le Grand, au cœur de la Presqu’île lyonnaise.

Quelle est l’histoire de Louis XIV avec Lyon?

Louis XIV (règne de 1643 à 1715) n’est venu qu’une seule fois à Lyon au cours de sa longue vie. Mais alors pourquoi trône-t-il au centre même de notre ville?

Pour le comprendre, remontons dans le temps. Remontons jusqu’au 24 novembre 1658. Louis XIV vient d’arriver dans notre bonne ville. Il y restera 2 mois (jusqu’au 13 janvier 1659). Le roi est alors encore célibataire. Dans ce voyage, le cardinal Mazarin et la reine-mère Anne d’Autriche l’accompagnent. Ils séjournent dans un hôtel près du terrain vague de Bellecour. Les mousquetaires sans doute aussi…. Mais pourquoi sont-ils à Lyon? Tout n’est qu’histoire de stratégie. La France est engluée dans sa guerre contre l’Espagne depuis 1635 (la Guerre de Trente ans). Louis XIV est encore célibataire. A Lyon, le roi reçoit la Savoie et entame un rapprochement avec Marguerite-Yolande de Savoie qui arrive le 28 novembre 1658 à son tour dans notre ville. Si la France venait à épouser la Savoie, ce serait là un atout majeur dans la guerre contre l’Espagne.

Mais l’Espagne ne l’entend pas de cette oreille! Le jour même de l’arrivée de la Savoie, un émissaire de Philippe IV d’Espagne arrive lui aussi à Lyon. Son message est clair: l’Espagne signera la paix. En gage de cette paix, Louis XIV épousera la fille du roi, l’infante Marie-Thérèse. La négociation s’engage. Et le 8 décembre, la duchesse de Savoie quitte Lyon.

Durant les 2 mois de son séjour chez nous, le roi découvre la ville. Il prend une décision qui sera impactante: la place Bellecour restera vide de toute construction afin d’offrir aux habitants un peu d’air. De plus, durant son séjour, le roi joua au jeu de paume, reçut de nombreuses personnes importantes, visita les monastères et autres maisons religieuses.

La statue de 1713

L’idée d’ériger dans notre ville, une statue en l’honneur de Louis XIV apparaît de son vivant. En effet, le 2 janvier 1685, le gouverneur de Lyon demande la permission au roi d’édifier dans la ville une statue monumentale en son honneur. Après une réponse favorable en date du 21 mars suivant, la Ville appelle Jules Hardouin-Mansart. Il établit rapidement un premier projet. Le sculpteur parisien Martin Desjardins se charge, quant à lui, de son exécution en 1688, sous le contrôle de Mansart.

Une installation compliquée

Desjardins réalise donc la statue en bronze dans son atelier de Paris en 1694. Toutefois, en raison de difficultés financières, la ville de Lyon ne l’achemine qu’en 1700. Mais à cette époque, les transports d’objets lourds et fragiles se réalisent par voix fluviale. Cela complique légèrement le voyage.

rejoindre Rouen par la Seine.
direction de la mer pour rejoindre Toulon le 6 janvier 1701.
petite pause à Arles
rejoindre Lyon, via le Rhône.

Louis XIV arrive enfin le 25 juillet 1701. Pour des raisons non connues (mais si quelqu’un dispose d’une source, nous sommes preneurs!), la ville mettra plus de 10 ans avant d’installer l’œuvre. Deux ans avant la mort de Louis XIV, soit le 27 décembre 1713, l’inauguration de la statue en son honneur a enfin lieu. Robert de Cotte, l’architecte royal, précise : « la statue sur le piédestal regarde au nord, passage le plus fréquenté par la communication des deux ponts du Rhône et de la Saône, pour être vue de face« .

Le piédestal

Puis, en 1715, la décoration du piédestal plaqué de marbre de carrare est confiée aux frères Coustou. Ils réalisent deux statues que nous vous présentons dans un autre article.

Destruction en 1792

Mais moins de cent ans après son installation, la statue connaît une période trouble: la Révolution française. Le décret de l’Assemblée législative du 11 août 1792 entérine alors la disparition de toutes les effigies royales, symboles insupportables. Puis le 14 août, il est précisé que le bronze des statues de Bellecour (Louis XIV, le Rhône et la Saône) sera converti en canons. Louis XIV doit être détruit. En réaction, le 19 août, la municipalité crée une commission chargée de mener à bien l’opération « dans la huitaine ». Les Lyonnais s’émeuvent pourtant de la destruction annoncée! Un citoyen propose même d’acheter la statue du souverain. Les amis des arts et le maire Vitet plaident pour le sauver. On suggère même de coiffer le cavalier du bonnet de la liberté ou, pour le moins, de respecter le cheval.

Rien n’y fait. Les statues des Coustou sont sauvées in extremis en étant mises à l’abri dans l’Hôtel de Ville. Mais le 28 août 1792, la statue royale de Desjardins est abattue. Brisée. Deux fondeurs récupèrent le métal pour en faire des canons.

La statue de 1825

Pourtant, de nombreux Lyonnais demeurent alors désespérés de cette place vide au cœur de la ville et dans leur cœur. Ainsi lors de la Restauration, en 1825, on remplace la statue par celle que nous connaissons.

Le lyonnais François Frédéric Lemot (1773-1827) réalise cette œuvre. Depuis Paris, la statue mettra 12 jours pour rejoindre Lyon. Un attelage de 24 chevaux la tracte.

Elle mesure 5m70 et pèse 15 tonnes. Comme pour l’original, Louis XIV est représenté en jeune souverain victorieux, montant son cheval.

Le sculpteur s’est-il suicidé?

Selon la légende – tenace -, le sculpteur Lemot se serait suicidé après avoir constaté une erreur monumentale qu’il aurait commise: à savoir, l’oubli des étriers du roi. En réalité, Louis XIV est représenté victorieux « à la romaine », par conséquent sans étrier! Il n’y a donc eu aucune erreur de commise.

ETAT DE LA STATUE

N’y allons pas par quatre chemins: Louis XIV et son cheval sont bien malades. La santé de l’ensemble est jugée préoccupante et va nécessiter une intervention.

Point sur la situation

Notre emblématique statue souffre de nombreuses dégradations visibles à l’œil nu: fissures, oxydation du cheval, fragilité de la fixation au socle. Afin d’évaluer les travaux de restauration, la Ville de Lyon et la Métropole ont lancé des études qui ont eu lieu du 22 au 24 janvier 2019.

L’analyse a été réalisée par un restaurateur spécialisé dans les statues monumentales et un bureau d’études « structure », le tout sous le contrôle de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) – service « conservation régionales des monuments historiques ». On découpe même une trappe pour pouvoir introduire une caméra endoscopique à l’intérieur du cheval.

Photo issue du journal « Le Progrès »

Une Restauration nécessaire

Après avoir rendu leur verdict, la sentence est tombée: Louis XIV descendra de son piédestal pour se refaire une santé. Cela se fera dans le cadre de la « Convention Patrimoine » signée entre l’Etat et la Ville (pour la restauration de lieux et monuments historiques de la ville).

Malheureusement prévue de janvier à octobre 2022, la restauration a été repoussée à 2023. De plus, elle était prévue en atelier. Mais elle se fera finalement sur la place Bellecour. Pourquoi? Et bien deux arguments ont tranché en ce sens:

un argument économique: déplacer une telle statue coûterait énormément d’argent
un argument technique: la déplacer serait également un défi technique et ferait planer un réel danger de détérioration à l’ensemble

De plus, cet atelier permettra la mise en place d’une véritable médiation autour de ce chantier. Dans le détail, les travaux comprennent donc:

tout d’abord la réalisation d’une plateforme atelier,
puis un coffrage et la dépose de la statue dans cet atelier,
viendra ensuite la restauration de la statue à proprement parler,
le socle en marbre sera également restauré,
ensuite, on remplacera la partie sommitale du socle, très dégradée,
on restaurera l’estrade avec remplacement de l’enrobé rouge défectueux,
et enfin viendra la repose de la statue.

Louis XIV et son cheval devraient donc retrouver leur socle et leur hauteur en novembre 2023.

Pendant ce temps là, les abords de la statue seront réaménagés. Pour l’heure, quid de ce que seront ces réaménagements.

Flash Info mai 2023: la Restauration commence!

Plusieurs fois annoncée, souvent reportée, cette fois-ci, nous touchons au but! La restauration de Louis XIV commence ce mois de juin 2023!

Après le départ (définitif) des statues du Rhône et de la Saône qui encadraient celle de Louis XIV, c’est donc la statue de Louis XIV sur son cheval qui va quitter le paysage de la place Bellecour. Mais pas pour longtemps! Ne vous inquiétez pas, ce départ n’est que temporaire! Et surtout elle ne part pas très loin. En effet, ce repère incontournable de la place Bellecour est abîmé par bien des décennies de bons et loyaux services: fissures, oxydation, corrosion de son squelette métallique….
Alors il était temps de lui redonner son lustre d’antan. Après le montage d’un échafaudage et d’un coffrage au cours du mois de juin, la statue dont on estime le poids entre 5 et 9 tonnes, devrait descendre de son piédestal début juillet 2023. Elle n’ira pas très loin, puisqu’un atelier de restauration sera installée sur la place même et devrait permettre à tout un chacun d’admirer le travail de restauration.

Alors Louis XIV trônera-t-il fièrement pour l’édition 2023 de la Fête des Lumières? Normalement oui. Mais la restauration ne sera pas encore totalement achevée! En effet, sur le premier trimestre 2024, l’estrade au pied de la statue devrait à son tour être rénovée. Quelle rénovation? Peut on avoir l’espoir de voir l’installation de copies du Rhône et de la Saône? Grand mystère!

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